• Le soleil d'Austerlitz n'a pas brillé pour nous

    Le site de la bataille vu depuis le momument de la Paix à Prace.


    Ça fait partie de notre histoire et  nous passions à proximité. Pas un pélerinage, juste une pensée pour ces milliers de jeunes hommes tués ou blessés pour satisfaire les ambitions de quelquesuns.

    Le château de Slavkov (Austerlitz), endroit charmant et très romantique, voit les mariages se succéder le samedi.

       
       

     La place en face du château.


    Et toujours un clic sur les photos pour les voir en plus grand.


    Je rajoute le très beau texte de Théophile Gautier laissé par Mathéo en commentaire mais dont la mise en page s'est perdue dans les méandres d'OB :


    Par l'ennui chassé de ma chambre,
    J'errais le long du boulevard :
    IL faisait un temps de décembre,
    Vent froid, fine pluie et brouillard ;

    Et là je vis, spectacle étrange,
    Échappés du sombre séjour,
    Sous la bruine et dans la fange,
    Passer des spectres en plein jour.

    Pourtant c'est la nuit que les ombres,
    Par un clair de lune allemand,
    Dans les vieilles tours en décombres,
    Reviennent ordinairement ;

    C'est la nuit que les Elfes sortent
    Avec leur robe humide au bord,
    Et sous les nénuphars emportent
    Leur valseur de fatigue mort ;

    C'est la nuit qu'a lieu la revue
    Dans la ballade de Zedlitz,
    Où l'Empereur, ombre entrevue,
    Compte les ombres d'Austerlitz.

    Mais des spectres près du Gymnase,
    A deux pas des Variétés,
    Sans brume ou linceul qui les gaze,
    Des spectres mouillés et crottés !
    Avec ses dents jaunes de tartre,
    Son crâne de mousse verdi,
    A Paris, boulevard Montmartre,
    Mob se montrant en plein midi !

    La chose vaut qu'on la regarde :
    Trois fantômes de vieux grognards,
    En uniformes de l'ex-garde,
    Avec deux ombres de hussards !

    On eût dit la lithographie
    Où, dessinés par un rayon,
    Les morts, que Raffet déifie,
    Passent, criant : Napoléon !

    Ce n'était pas les morts qu'éveille
    Le son du nocturne tambour,
    Mais bien quelques vieux de la vieille
    Qui célébraient le grand retour.

    Depuis la suprême bataille,
    L'un a maigri, l'autre a grossi ;
    L'habit jadis fait à leur taille,
    Est trop grand ou trop rétréci.


    Nobles lambeaux, défroque épique,
    Saints haillons, qu'étoile une croix,
    Dans leur ridicule héroïque
    Plus beaux que des manteaux de rois !


    Un plumet énervé palpite
    Sur leur kolbach fauve et pelé ;
    Près des trous de balle, la mite
    A rongé leur dolman criblé ;
    Leur culotte de peau trop large
    Fait mille plis sur leur fémur ;
    Leur sabre rouillé, lourde charge,
    Creuse le sol et bat le mur ;

    Ou bien un embonpoint grotesque,
    Avec grand'peine boutonné,
    Fait un poussah, dont on rit presque,
    Du vieux héros tout chevronné.

    Ne les raillez pas, camarade ;
    Saluez plutôt chapeau bas
    Ces Achilles d'une Iliade
    Qu'Homère n'inventerait pas.

    Respectez leur tête chenue !
    Sur leur front par vingt cieux bronzé,
    La cicatrice continue
    Le sillon que l'âge a creusé.

    Leur peau, bizarrement noircie,
    Dit l'Égypte aux soleils brûlants ;
    Et les neiges de la Russie
    Poudrent encor leurs cheveux blancs.

    Si leurs mains tremblent, c'est sans doute
    Du froid de la Bérésina ;
    Et s'ils boitent, c'est que la route
    Est longue du Caire à Wilna ;

    S'ils sont perclus, c'est qu'à la guerre
    Les drapeaux étaient leurs seuls draps ;
    Et si leur manche ne va guère,
    C'est qu'un boulet a pris leur bras.

    Ne nous moquons pas de ces hommes
    Qu'en riant le gamin poursuit ;
    Ils furent le jour dont nous sommes
    Le soir et peut-être la nuit.

    Quand on oublie, ils se souviennent !
    Lancier rouge et grenadier bleu,
    Au pied de la colonne, ils viennent
    Comme à l'autel de leur seul dieu.

    Là, fiers de leur longue souffrance,
    Reconnaissants des maux subis,
    Ils sentent le coeur de la France
    Battre sous leurs pauvres habits.

    Aussi les pleurs trempent le rire
    En voyant ce saint carnaval,
    Cette mascarade d'empire
    Passer comme un matin de bal ;

    Et l'aigle de la grande armée
    Dans le ciel qu'emplit son essor,
    Du fond d'une gloire enflammée,
    Étend sur eux ses ailes d'or !


    T.Gautier


     !



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  • Commentaires

    1
    Mardi 14 Juillet 2009 à 09:32
    matheo
    Par l'ennui chassé de ma chambre, J'errais le long du boulevard : IL faisait un temps de décembre, Vent froid, fine pluie et brouillard ; Et là je vis, spectacle étrange, Échappés du sombre séjour, Sous la bruine et dans la fange, Passer des spectres en plein jour. Pourtant c'est la nuit que les ombres, Par un clair de lune allemand, Dans les vieilles tours en décombres, Reviennent ordinairement ; C'est la nuit que les Elfes sortent Avec leur robe humide au bord, Et sous les nénuphars emportent Leur valseur de fatigue mort ; C'est la nuit qu'a lieu la revue Dans la ballade de Zedlitz, Où l'Empereur, ombre entrevue, Compte les ombres d'Austerlitz. Mais des spectres près du Gymnase, A deux pas des Variétés, Sans brume ou linceul qui les gaze, Des spectres mouillés et crottés ! Avec ses dents jaunes de tartre, Son crâne de mousse verdi, A Paris, boulevard Montmartre, Mob se montrant en plein midi ! La chose vaut qu'on la regarde : Trois fantômes de vieux grognards, En uniformes de l'ex-garde, Avec deux ombres de hussards ! On eût dit la lithographie Où, dessinés par un rayon, Les morts, que Raffet déifie, Passent, criant : Napoléon ! Ce n'était pas les morts qu'éveille Le son du nocturne tambour, Mais bien quelques vieux de la vieille Qui célébraient le grand retour. Depuis la suprême bataille, L'un a maigri, l'autre a grossi ; L'habit jadis fait à leur taille, Est trop grand ou trop rétréci. Nobles lambeaux, défroque épique, Saints haillons, qu'étoile une croix, Dans leur ridicule héroïque Plus beaux que des manteaux de rois ! Un plumet énervé palpite Sur leur kolbach fauve et pelé ; Près des trous de balle, la mite A rongé leur dolman criblé ; Leur culotte de peau trop large Fait mille plis sur leur fémur ; Leur sabre rouillé, lourde charge, Creuse le sol et bat le mur ; Ou bien un embonpoint grotesque, Avec grand'peine boutonné, Fait un poussah, dont on rit presque, Du vieux héros tout chevronné. Ne les raillez pas, camarade ; Saluez plutôt chapeau bas Ces Achilles d'une Iliade Qu'Homère n'inventerait pas. Respectez leur tête chenue ! Sur leur front par vingt cieux bronzé, La cicatrice continue Le sillon que l'âge a creusé. Leur peau, bizarrement noircie, Dit l'Égypte aux soleils brûlants ; Et les neiges de la Russie Poudrent encor leurs cheveux blancs. Si leurs mains tremblent, c'est sans doute Du froid de la Bérésina ; Et s'ils boitent, c'est que la route Est longue du Caire à Wilna ; S'ils sont perclus, c'est qu'à la guerre Les drapeaux étaient leurs seuls draps ; Et si leur manche ne va guère, C'est qu'un boulet a pris leur bras. Ne nous moquons pas de ces hommes Qu'en riant le gamin poursuit ; Ils furent le jour dont nous sommes Le soir et peut-être la nuit. Quand on oublie, ils se souviennent ! Lancier rouge et grenadier bleu, Au pied de la colonne, ils viennent Comme à l'autel de leur seul dieu. Là, fiers de leur longue souffrance, Reconnaissants des maux subis, Ils sentent le coeur de la France Battre sous leurs pauvres habits. Aussi les pleurs trempent le rire En voyant ce saint carnaval, Cette mascarade d'empire Passer comme un matin de bal ; Et l'aigle de la grande armée Dans le ciel qu'emplit son essor, Du fond d'une gloire enflammée, Étend sur eux ses ailes d'or ! T.Gautier
    2
    Mardi 14 Juillet 2009 à 09:42
    matheo
    dommage la mise en page n'a pas été conservée.
    Bonne journée
    3
    Mardi 14 Juillet 2009 à 10:15
    heure_bleue
    C'est superbe, j'ai agrandi les photos et je trouve que le chateau est très bien entretenu, il ne fait pas débine comme le Musée Carnavalet, l'ancienne demeure de Madame de Sévigné...
    4
    Mardi 14 Juillet 2009 à 10:16
    catherine
    Je ne comprends pas : j'ai été voir et chez moi, avec firefox, j'ai bien la mise en page prévue.
    Bonne journée à toi aussi.
    5
    Mardi 14 Juillet 2009 à 10:18
    catherine
    Ah j'ai compris, tu parlais de ton poème pas de mes photos.
    C'est vrai que c'est dommage.
    Un bien beau texte.
    6
    Mardi 14 Juillet 2009 à 10:21
    matheo
    Oui je suis un idiot.
    Tes photos sont superbes et c'est pourquoi j'ai voulu mettre ce poème de Gautier.
    7
    Mardi 14 Juillet 2009 à 10:43
    Kristin
    un beau château en effet!! tout à fait un décor de mariage ou de film...et un très beau poême aussi , illustration parfaite!
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